L’Arnaqueur de Tinder, l’histoire d’un pervers et d’une victime

[Décryptage avec quelques concepts d’analyse transactionnelle]

Il était une fois une jeune femme suédoise qui vivait à Londres. La trentaine, un travail, issue de la classe aisée.

Blonde, jolie, souriante, elle croyait aux contes de fées. Elle rêvait de rencontrer le prince charmant, comme dans la Belle et la Bête, son Disney préféré.

L’enjeu qu’elle mettait dans le fait de rencontrer son prince charmant était très fort, bien supérieur à celui qu’elle mettait dans son plan de carrière ou d’autres aspects de sa vie.

Dans ses croyances, son cadre de référence, réussir sa vie en tant que femme impliquait d’avoir rencontré l’homme de sa vie. L’homme en question, en bonne illusion de prince charmant, devait répondre à un certain nombre de critères : réussite sociale et économique, monogamie, etc.

La jeune femme décida donc de dédier beaucoup d’énergie à chercher cet homme, en commençant par l’application Tinder…

Il était une fois un jeune homme israélien. La trentaine, ni très beau, ni athlétique. Il avait été élevé dans un milieu pauvre, dans un logement insalubre, par une mère bossue.

Beaucoup de raisons pour être humilié ou se sentir humilié. Sa mère l’avait rejeté, disant qu’elle n’avait plus de fils.

L’image qu’il avait de lui n’était sûrement pas celle du prince charmant, et sans doute vivait-il cette injustice de manière très vive, avec beaucoup de colère, une envie de vengeance.

Ce jeune homme décida donc de piéger les femmes qui recherchaient le prince charmant, via Tinder…

Nous voilà donc sur Tinder. Le prince charmant des temps modernes a troqué le cheval blanc contre un jet privé. Il est riche, charmant, vivant la vie rêvée selon Instagram… Il partage ses photos de soirées privées, voitures de luxe, voyages dans le monde entier… le décor et le masque sont parfaits, issus du retour d’expérience de nombreuses années de fraudes en tout genre.

Sur le profil Tinder du prince charmant, toutes celles qui rêvent de cette illusion matchent son profil. Il n’a que l’embarras du choix.

Mais c’est une Cendrillon qu’il cherche, alors il branche son radar pour trouver celle qui se sent inférieure, celle qui voudra à tout prix lui faire plaisir, qui aura le sentiment d’exister à travers leur relation.

Ils commencent à tchatter et il lui donne exactement ce dont elle rêve : l’illusion du prince charmant… Il l’emmène en jet, dans des hôtels et restaurants de luxe, couche avec elle, lui parle d’amour, la séduit.

Elle est sous le charme, amoureuse, et puis elle vit le rêve. Alors quand elle perçoit des éléments de réalité qui ne correspondent pas au rêve, elle les élude. Comme quand il lui demande de choisir un appartement pour vivre à deux, mais qu’il reste totalement absent de ce projet commun…

Jusqu’au jour où il lui joue le drame : une attaque, il est en danger, il a besoin d’elle.

Il a joué cet acte des dizaines de fois, il est rompu à l’exercice, il sait quoi dire pour brancher le gyrophare intérieur de sa belle… Il lui demande de l’argent, lui donne sa parole, lui promet son amour… Et part faire la fête avec une autre sans qu’elle le sache…

Jusqu’à ce qu’elle découvre le pot-au-rose, endettée de 250 000€ ; confirmée dans ses croyances qu’elle n’a pas beaucoup de valeur.

Il exulte, l’adrénaline à son comble, se prouve qu’il est plus fort, plus intelligent, supérieur à tous ceux qui l’ont humilié, et aux femmes, à commencer par sa mère, qui l’ont rejeté. Il fantasme peut-être sur le fait qu’on voit son pouvoir pendant qu’il reprend ce même cycle avec une autre.

Cette danse, cette rencontre entre deux souffrances qui matchent et s’entretiennent, illustre deux façons de « lire » la relation, à travers :

  • Pour lui, le phénomène de la perversion : il est égocentrique, culpabilise l’autre sous n’importe quel prétexte, séduit, alterne le chaud et le froid, manipule et manifeste une jouissance évidente devant la souffrance de l’autre, ment avec beaucoup d’assertivité, etc.
  • Pour elle, les jeux psychologiques, et la formule J de Berne (concept d’analyse transactionnelle un peu pointu) : Attrape-Nigaud + Point Faible à Réponse + Déclic + Moment de stupeur + Bénéfice final**
  • le profil Tinder est l’Attrape-Nigaud + le Point Faible est la quête du prince charmant = Réponse : relation entre les deux => jusqu’au Déclic : une dette de 250 000€ => et un Moment de stupeur : « j’ai été dupée !!! » => Bénéfice : « je suis nulle »

Avec les lunettes de l’Analyse Transactionnelle, on peut voir d’autres éléments qui restent des hypothèses :

  • Injonctions :
    • Pour elle : « ne sois pas importante », « ne pense pas », « ne réussis pas », etc.
    • Pour lui : « n’existe pas », « ne sois pas proche », « ne ressens pas », etc.
  • La forme de passivité : elle se suradapte à ses besoins à lui, en oubliant ses besoins à elle.
  • La symbiose : on peut voir comme le manipulateur entraîne la victime dans une symbiose malsaine. Il joue progressivement la dépendance afin qu’elle le prenne en charge (notamment quand il a besoin d’argent) en s’oubliant complètement, en occultant ses besoins à elle.
  • Drivers : un « fais plaisir » très prononcé chez elle, un « sois parfait » sans doute chez lui pour que son arnaque soit aussi aboutie.
  • Scénario : On peut imaginer qu’elle a dans ses croyances le fait qu’une femme n’a de la valeur que quand elle a un mari puissant, et qu’elle-même n’a pas beaucoup de valeur. On peut imaginer qu’il a dans ses croyances le fait que les femmes sont vénales, manipulables et qu’il n’a de valeur que quand il les écrase et vit dans l’opulence, et que lui-même (le vrai lui derrière le masque) n’a pas beaucoup de valeur.

Article issu de travaux menés par Karine Blondeau et Hélène Pagnod-Rossiaux

** Du fait de leur mécanisme répétitif, Éric Berne a modélisé les jeux psychologiques avec une formule quasi mathématique. Attrape-nigaud + point faible –> réponse + déclic + moment de stupeur + bénéfice négatif

Pour aller plus loin :

Découvrir l’analyse transactionnelle : https://www.ifat-asso.org/concepts-base/#:~:text=La%20formule%20J,moment%20de%20stupeur%20%2B%20b%C3%A9n%C3%A9fice%20n%C3%A9gatif.

Et vous, à quels jeux psychologiques jouez-vous ? https://a-travers-soi.com/2019/09/22/et-vous-a-quels-jeux-psychologiques-jouez-vous/

Comment se détacher des jeux psychologiques ? https://a-travers-soi.com/2019/11/19/comment-se-detacher-des-jeux-psychologiques/

Les jeux psychologiques : https://analysetransactionnelle.fr/p-Les_jeux_psychologiques

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